La fiscalité immobilière française connaît une mutation profonde avec l’entrée en vigueur de la réforme fiscale 2025. Cette transformation vise à adapter notre système aux défis économiques contemporains tout en répondant aux préoccupations environnementales grandissantes. Les propriétaires, investisseurs et particuliers devront s’adapter à un nouveau cadre réglementaire qui modifie substantiellement l’imposition des plus-values, la taxation des revenus locatifs, et introduit des incitations fiscales innovantes. Ces changements s’inscrivent dans une volonté de rééquilibrage territorial et d’optimisation de la collecte fiscale.
La réforme des plus-values immobilières : un nouveau paradigme fiscal
L’année 2025 marque un tournant dans l’approche des plus-values immobilières avec l’instauration d’un barème progressif remplaçant le taux forfaitaire actuel. Ce nouveau système établit des tranches d’imposition variant de 19% à 36% selon le montant de la plus-value réalisée, contre un taux unique de 19% auparavant. Les prélèvements sociaux de 17,2% demeurent applicables, portant potentiellement le taux global à 53,2% pour les transactions les plus importantes.
La réforme introduit une distinction inédite entre les biens détenus à court terme (moins de 6 ans) et ceux conservés sur la longue durée. Les abattements pour durée de détention sont recalibrés avec une accélération significative : 6% par année au-delà de la cinquième année, contre 4% actuellement. Cette modulation vise à décourager la spéculation immobilière tout en favorisant l’investissement pérenne.
Un aspect novateur concerne l’introduction d’un coefficient correcteur lié à la performance énergétique du bien. Les propriétés classées A ou B bénéficient d’un abattement supplémentaire de 10%, tandis que les passoires thermiques (étiquettes F et G) subissent une majoration de 5% du taux applicable. Cette mesure s’inscrit dans la continuité des politiques de transition écologique et incite concrètement à la rénovation énergétique du parc immobilier français.
Impôt sur la fortune immobilière : élargissement et nouvelles exonérations
L’IFI connaît une refonte substantielle avec l’abaissement du seuil d’entrée à 1,1 million d’euros de patrimoine immobilier net, contre 1,3 million précédemment. Cette mesure élargit mécaniquement le nombre de contribuables assujettis, estimé à 35 000 foyers supplémentaires selon les projections du Ministère de l’Économie. Le barème progresse désormais par tranches de 0,5% à 1,8% pour la fraction supérieure à 10 millions d’euros.
En contrepartie, de nouvelles exonérations ciblées sont introduites. Les logements mis à disposition d’associations reconnues d’utilité publique pour l’hébergement de personnes défavorisées bénéficient d’un abattement de 75% sur leur valeur vénale. Les biens immobiliers situés dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) profitent d’un abattement de 50%, plafonné à 300 000 euros, sous condition d’occupation effective ou de mise en location longue durée.
La définition des biens professionnels exonérés est précisée et élargie aux locaux utilisés pour l’exercice d’une activité libérale ou entrepreneuriale générant au moins 50% des revenus professionnels du contribuable. Cette clarification met fin à plusieurs années de contentieux et sécurise juridiquement de nombreuses situations jusqu’alors incertaines.
Le calcul de l’assiette imposable intègre désormais les créances détenues sur des sociétés civiles immobilières (SCI) au prorata des actifs immobiliers détenus par ces structures, comblant ainsi une lacune fréquemment exploitée. Cette disposition s’accompagne d’obligations déclaratives renforcées concernant les montages juridiques complexes impliquant des entités étrangères.
La révolution de la fiscalité locative : du micro-foncier à l’imposition des plateformes
Le régime du micro-foncier subit une transformation majeure avec un abattement forfaitaire désormais modulé selon la nature et la localisation des biens. L’abattement standard est ramené à 25% (contre 30% actuellement) pour les locations classiques, tandis qu’il est porté à 40% pour les logements répondant aux critères de performance énergétique A ou B. À l’inverse, les biens classés F et G voient l’abattement réduit progressivement jusqu’à 15% d’ici 2027, renforçant la pression fiscale sur les propriétaires de passoires thermiques.
La location meublée connaît un bouleversement avec la fin programmée du statut de loueur en meublé non professionnel (LMNP) dans sa forme actuelle. L’amortissement des biens, jusqu’alors déductible du revenu imposable, est plafonné à 5 000 euros annuels. Les locations de courte durée via des plateformes numériques sont particulièrement ciblées avec l’instauration d’une taxe spécifique de 7% applicable aux revenus excédant 10 000 euros annuels, indépendamment de l’impôt sur le revenu traditionnel.
Cette réforme s’accompagne d’une simplification administrative notable : l’obligation de tenir une comptabilité distincte pour chaque bien est supprimée au profit d’une déclaration unifiée. Les propriétaires peuvent désormais opter pour une imposition au taux forfaitaire de 28% (prélèvements sociaux inclus) sur leurs revenus locatifs bruts, indépendamment de leur tranche marginale d’imposition.
- Création d’un crédit d’impôt de 25% pour les travaux de rénovation énergétique dans les logements locatifs, plafonné à 20 000 euros sur quatre ans
- Instauration d’un abattement exceptionnel de 85% sur les plus-values réalisées lors de la cession de terrains destinés à la construction de logements sociaux jusqu’au 31 décembre 2027
Taxation des résidences secondaires : modulation territoriale et surtaxes ciblées
La fiscalité des résidences secondaires connaît un durcissement significatif avec l’extension du périmètre des communes autorisées à majorer la taxe d’habitation. Jusqu’à présent limitée aux zones tendues, cette faculté est étendue aux communes touristiques présentant un taux de résidences secondaires supérieur à 20% du parc immobilier total. Le plafond de majoration est relevé de 60% à 100%, laissant une marge de manœuvre considérable aux collectivités territoriales.
Une innovation majeure réside dans l’introduction d’une taxe progressive basée sur la durée d’occupation effective des résidences secondaires. Les propriétaires devront déclarer annuellement le nombre de jours d’occupation personnelle ou familiale. Les biens occupés moins de 60 jours par an pourront être soumis à une surtaxe pouvant atteindre 10% de la valeur locative, sauf mise en location effective pendant les périodes d’inoccupation.
Cette réforme s’accompagne de mesures compensatoires pour certaines situations spécifiques. Les résidences secondaires détenues par des retraités dans leur ancienne commune d’activité professionnelle bénéficient d’un abattement de 50% sur la majoration applicable. De même, les biens transmis par succession sont exonérés de surtaxe pendant une période transitoire de trois ans, permettant aux héritiers d’organiser sereinement la gestion de leur patrimoine.
Le législateur introduit par ailleurs un mécanisme de plafonnement global de la fiscalité applicable aux résidences secondaires. L’ensemble des prélèvements (taxe foncière, taxe d’habitation majorée et surtaxes diverses) ne pourra excéder 4% de la valeur vénale du bien, offrant ainsi une protection contre les effets cumulatifs potentiellement confiscatoires dans les zones les plus prisées du territoire.
Les leviers fiscaux au service de la transition écologique immobilière
La fiscalité 2025 consacre définitivement l’écologie comme pilier structurant de l’imposition immobilière. Le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) disparaît au profit d’un système de déduction fiscale directe sur les revenus fonciers, sans plafonnement global mais avec des montants maximaux par type de travaux. Cette approche avantage les propriétaires-bailleurs jusqu’alors exclus du dispositif et simplifie considérablement le parcours administratif.
L’innovation majeure réside dans l’instauration d’un malus progressif applicable aux transactions immobilières concernant les biens énergivores. Ce prélèvement, variant de 1% à 5% du prix de vente pour les logements classés E à G, alimente directement un fonds dédié à la rénovation énergétique. Ce mécanisme incite puissamment à la réalisation de travaux avant mise en vente, le vendeur pouvant s’exonérer du malus en présentant un plan de rénovation chiffré et en consignant les sommes correspondantes.
Les collectivités locales disposent désormais de la faculté d’exonérer partiellement de taxe foncière les bâtiments présentant une performance énergétique exemplaire. Cette exonération, plafonnée à 50% pendant cinq ans, s’applique automatiquement aux constructions neuves dépassant de 20% les exigences de la réglementation thermique en vigueur et aux bâtiments anciens ayant fait l’objet d’une rénovation globale.
- Création d’un amortissement accéléré sur 5 ans pour les équipements de production d’énergie renouvelable installés dans des immeubles de rapport
- Instauration d’une TVA réduite à 5,5% sur l’ensemble des travaux de rénovation énergétique réalisés par des entreprises certifiées RGE, sans condition de bouquet de travaux
Le dispositif Denormandie, initialement prévu pour s’éteindre fin 2023, est pérennisé et recentré exclusivement sur la rénovation énergétique dans les centres-villes dégradés. La réduction d’impôt est modulée selon l’ampleur de l’amélioration énergétique obtenue, pouvant atteindre 25% de l’investissement total pour les rénovations permettant un gain de trois classes énergétiques.
